7

 

 

Le lendemain était un vendredi. Non seulement c’était ma seule journée de congé de la semaine, mais j’avais un rendez-vous galant. Autant dire que c’était jour de fête. Et je n’avais pas l’intention de le gâcher en me morfondant. Bien qu’il fasse encore un peu frais pour pratiquer une telle activité (si tant est qu’on puisse parler d’activité, en l’occurrence), j’ai décidé de m’adonner à mon passe-temps favori : j’ai enfilé mon bikini, je me suis enduite de crème des pieds à la tête, j’ai pris un bouquin, ma radio, un chapeau et je suis allée m’allonger sur le transat réglable que j’avais acheté pendant les soldes de fin d’été, dans le jardin, devant la maison (là où il y avait le moins d’arbres et d’arbustes en fleurs susceptibles d’attirer les bestioles qui piquent). J’ai lu, chanté les chansons qui passaient à la radio et je me suis verni les ongles des mains et des orteils. Au début, j’ai bien eu la chair de poule, mais comme il n’y avait pas de vent, je me suis vite réchauffée.

Je n’ai pas eu de visite, je ne pouvais pas entendre le téléphone et, le soleil étant levé, les vampires étaient couchés : j’ai passé un moment de pur bonheur, seule avec moi-même. Vers 13 heures, j’ai eu envie d’aller en ville faire des courses et m’acheter un nouveau soutien-gorge. Je me suis arrêtée à la boîte aux lettres, au bout de l’allée, pour voir si le facteur était déjà passé. Bingo ! Ma facture pour le câble et  ma facture d’électricité étaient arrivées : plutôt déprimant. Mais sous une pub pour des soldes se cachait une invitation pour l’enterrement de vie de jeune fille de Halleigh (une petite fête organisée à l’initiative de trois de ses collègues, qui avaient joint une liste de cadeaux : ménagère et articles de cuisine). Ça alors ! J’étais étonnée, mais contente aussi. C’est vrai que j’avais été la voisine de Halleigh pendant quelques semaines, quand je m’étais installée dans l’un des meublés que possédait Sam, le temps que les travaux soient finis chez moi, après l’incendie. On s’était vues au moins une fois par jour, durant cette période. Ce n’était donc pas si inimaginable qu’elle ait pensé à m’inviter. Et puis, peut-être qu’elle avait été soulagée que Cody ait été si rapidement retrouvé.

Je ne recevais pas souvent d’invitation. C’était donc une agréable surprise. Il ne me restait plus qu’à acheter un cadeau à Halleigh. Ça tombait bien : j’allais justement au supermarché de Clarice.

Après mûre réflexion, je lui ai pris un grand plat à gratin Corning Ware. Ça peut toujours servir. J’ai aussi acheté du jus de fruits, du fromage, du bacon, du papier cadeau et un super joli soutien-gorge bleu avec slip assorti.

Une fois rentrée et après avoir rangé mes courses, j’ai enveloppé mon cadeau dans un beau papier argenté et j’ai collé un gros nœud blanc dessus. J’ai noté l’heure de la fête à la bonne date, sur mon calendrier, et j’ai placé l’invitation sur le dessus de la boîte. Mission accomplie.

Puisque j’étais pleine de bonnes intentions, j’en ai profité pour nettoyer l’extérieur et l’intérieur du réfrigérateur, après le déjeuner. Et pendant que j’y étais, j’ai mis un tas de linge à tourner dans la machine à laver. Ensuite, comme Quinn devait passer me chercher, j’ai fait le tour de la maison pour m’assurer que tout était en ordre. Sans même me donner le temps de réfléchir à ce que je faisais, j’ai changé mes draps et nettoyé ma salle de bains. Non que j’aie d’idée derrière la tête, mais il vaut mieux parer à toute éventualité, non ? Et puis, ça me faisait du bien de savoir que tout était propre et impeccablement rangé. J’ai changé gants et serviettes dans le cabinet de toilette du couloir et dans ma salle de bains, épousseté vite fait bien fait le salon, ma chambre et fait un rapide circuit avec l’aspirateur. Avant de passer sous la douche, j’ai même balayé les deux vérandas, tout en sachant pertinemment qu’elles seraient recouvertes de poussière jaune avant même que je sois rentrée.

J’ai laissé mes cheveux sécher au soleil – et probablement attraper tout le pollen qui passait, pendant qu’ils y étaient –, puis je me suis maquillée avec soin : un peu de fard à paupières, beaucoup de mascara, un nuage de poudre et une touche de rouge à lèvres. J’ai ensuite enfilé mes sous-vêtements tout neufs : à nouveau petit ami, nouvelle lingerie. Me gainer de dentelle bleu nuit m’a donné l’impression d’être différente, spéciale. Je me suis regardée dans le miroir en pied pour voir le résultat : top ! J’ai levé les deux pouces dans la glace en signe d’approbation (si on ne s’encourage pas de temps en temps, qui le fera à notre place, hein ?).

L’ensemble que j’avais acheté chez Nikkie était coupé dans un tissu bleu roi au superbe tombé. J’ai remonté la fermeture Éclair du pantalon et passé le haut. C’était une sorte de cache-cœur sans manches noué sur le côté. J’ai essayé différentes profondeurs de décolleté jusqu’à ce que je trouve la juste mesure entre ce qu’il fallait dévoiler et ce qu’il fallait cacher : la fragile limite entre le sexy et le vulgaire.

J’ai sorti de l’armoire mon étole noire – celle que Lèn m’avait offerte pour remplacer le châle en soie que Debbie Pelt avait délibérément brûlé. J’en aurais besoin en fin de soirée. J’ai glissé mes pieds aux orteils vernis dans mes sandales noires, puis j’ai fait quelques essais de bijoux, pour finalement me rabattre sur une simple chaîne en or qui avait appartenu à ma grand-mère et de petites boucles d’oreilles assorties.

Ah ! On frappait à ma porte. J’ai jeté un coup d’œil à la pendule, un peu étonnée que Quinn ait un quart d’heure d’avance. Et puis, je n’avais pas entendu son pick-up arriver. Je suis allée ouvrir et me suis retrouvée nez à nez avec... Eric.

Ne jamais ouvrir sans vérifier. Ne jamais s’imaginer que l’on sait qui est derrière la porte. Non, mais quelle gourde ! C’était bien la peine d’avoir fait poser un judas ! Comme il n’y avait aucune voiture à l’horizon, j’en ai déduit qu’Eric avait emprunté la voie des airs. Aurait-il été pressé, par hasard ?

— Puis-je entrer ? m’a-t-il poliment demandé.

Il m’a reluquée de haut en bas, puis, après avoir admiré le panorama, a fini par se rendre compte qu’il ne lui était pas destiné. Ça ne lui a pas plu.

— Tu attends de la visite, je présume ?

— Il se trouve que oui. Et pour ne rien te cacher, je préférerais que tu restes de ce côté de ma porte, ai-je répondu en reculant à distance respectueuse.

— Tu as dit à Pam que tu ne voulais pas venir à Shreveport. Je me suis donc déplacé pour voir pourquoi tu refusais de te rendre à ma convocation.

Il avait soudain un accent à couper au couteau. Bizarre, d’habitude, il s’entendait à peine... Pour être furieux, il était furieux !

— Je n’avais pas le temps. Je sors, ce soir.

— C’est ce que je vois, a-t-il constaté. Et avec qui ?

— Crois-tu vraiment que ce soient tes affaires, Éric ? lui ai-je rétorqué en le défiant du regard.

— Évidemment !

Ça m’a un peu décontenancée, sur le coup.

— Et pour quelle raison, si je peux me permettre ?

— Tu devrais être à moi : j’ai couché avec toi, je t’ai témoigné de l’affection, je t’ai... aidée financièrement...

— Tu m’as payé ce que tu me devais, pour services rendus, ai-je répliqué. Et puis, tu as peut-être couché avec moi, mais pas récemment, et tu n’as pas vraiment manifesté le désir de renouveler l’expérience. Quant à me témoigner de l’affection, tu as une drôle de façon de t’y prendre. Je n’ai jamais entendu dire que la plus parfaite indifférence, en dehors de quelques ordres transmis par des larbins, était une façon de manifester son affection.

D’accord, ce n’était pas très clair, mais je savais qu’il me comprendrait.

— Tu traites Pam de « larbin » ?

J’ai cru surprendre l’ombre d’un sourire sur ses lèvres. Puis la colère a repris le dessus. Je m’en suis rendu compte à son accent encore plus marqué.

— Je n’ai pas à être pendu à tes basques pour te prouver mon affection. Je suis le shérif. Tu... tu es ma propriété.

J’en suis restée bouche bée. Je sais que je devais avoir l’air ridicule, la bouche ouverte comme un four, mais c’était plus fort que moi.

— Ta... ta propriété ? ai-je répété, hors de moi. Ça me ferait mal ! Personne ne me dit ce que je dois faire !

— Tu es obligée de venir avec moi à la conférence régionale, a insisté Eric, les lèvres pincées, le regard brûlant de colère. C’est la raison pour laquelle je t’avais convoquée à Shreveport : pour parler horaires, organisation du voyage, etc.

— Je ne suis obligée d’aller nulle part avec toi. Tu t’es fait doubler, mon pote.

— Mon pote ? Mon pote ? a-t-il hurlé.

Ça aurait sans doute dégénéré, si Quinn n’était pas arrivé à ce moment-là. Il avait échangé son pick-up contre une Lincoln Continental, et je reconnais que j’ai éprouvé une jouissance mesquine de snobinarde à la simple idée de monter dedans. J’avais un peu choisi ma tenue en ayant à l’esprit que j’aurais à grimper dans un pick-up, mais ça ne suffisait pas à me gâcher le plaisir que j’aurais à me glisser dans cette voiture de luxe. Quinn a traversé la pelouse et gravi les marches de la véranda à une vitesse incroyable. Il ne semblait pas se presser, et pourtant, tout à coup, il était là. Et je lui souriais, et il était magnifique. Il portait un costume anthracite, une chemise parme et une cravate associant les deux couleurs dans des motifs cachemire. Un anneau d’or ornait son oreille droite.

Éric montrait les crocs.

— Bonsoir, Éric, a dit calmement Quinn, d’une voix de basse dont les vibrations se sont répercutées le long de mon échine. Sookie, tu es belle à croquer.

Il m’a souri, et les vibrations en question se sont propagées dans une tout autre région de mon anatomie.

— Toi aussi, tu es très beau, lui ai-je répondu, en m’efforçant de ne pas sourire aux anges, comme une demeurée.

Ça ne se fait pas de baver devant tout le monde.

— Qu’as-tu dit à Sookie, Quinn ? a demandé Éric.

Les deux hommes se fusillaient du regard. Je ne pensais pas être à l’origine de cette mutuelle animosité. Je n’étais probablement qu’un symptôme, pas la cause du mal. Oui, il y avait anguille sous roche.

— J’ai dit à Sookie que la reine sollicitait sa présence à la conférence, à ses côtés, et qu’une convocation de la reine prenait le pas sur la tienne, a répondu Quinn, sans l’ombre d’une hésitation.

— Depuis quand la reine confie-t-elle ses messages à un changeling ? a craché Éric avec dédain.

— Depuis que ce changeling s’est acquitté dignement d’une tâche pour elle, dans le cadre de ses activités professionnelles, a rétorqué Quinn sans se démonter. Maître Cataliades a suggéré à Sa Majesté que je pourrais utiliser à son profit mes talents de diplomate, et mes associés n’ont été que trop heureux de m’accorder le temps nécessaire pour accomplir toute mission qu’elle voudrait bien me confier.

Je n’étais pas certaine d’avoir tout suivi, mais j’avais compris l’essentiel.

Éric était fou de rage. En fait, il était si furieux que ses yeux lançaient pratiquement des éclairs.

— Cette femme a été mienne et restera mienne, a-t-il affirmé, avec une telle assurance que j’ai failli aller vérifier que je n’avais pas de marque au fer rouge sur les fesses.

Quinn s’est tourné vers moi.

— Tu es à lui, oui ou non ?

— Non.

— Bon, alors allons-y. Le spectacle nous attend.

Il ne semblait ni effrayé, ni même un tant soit peu inquiet. Je me suis demandé s’il jouait la comédie ou non. Dans un cas comme dans l’autre, c’était plutôt impressionnant.

Il fallait que je passe devant Éric pour aller jusqu’à la voiture. Je n’ai pas pu m’empêcher de lever les yeux vers lui à ce moment-là. Il ne fait pas bon se trouver à proximité d’Éric quand il est hors de lui, et je préférais me tenir sur mes gardes. Éric se fait rarement doubler dans des affaires importantes, et ma convocation par la reine de Louisiane – sa reine – était une affaire importante. Le fait que je sorte avec Quinn lui restait en travers de la gorge, aussi. Eh bien, il allait pourtant devoir l’avaler, que ça lui plaise ou non.

Je me suis bientôt retrouvée assise dans la Lincoln. Quinn a effectué une habile manœuvre pour faire demi-tour. J’ai recommencé à respirer, lentement, prudemment. Ça m’a pris quelques minutes pour recouvrer mon calme. Peu à peu, mes mains se sont décrispées. Je me suis alors rendu compte qu’un silence pesant avait envahi la voiture. Je me suis secouée.

— Est-ce que tu vas souvent au théâtre, quand tu voyages pour ton travail ? ai-je lancé sur le ton d’une conversation mondaine.

Ça l’a fait rire. Un bon gros éclat de rire, profond et chaleureux, qui a chassé toute la tension d’un coup.

— Oui, je vais au cinéma, au théâtre, et j’assiste à tous les événements sportifs qui se présentent. Je ne suis pas un fan de télévision. J’aime sortir de ma chambre d’hôtel ou de mon appartement et regarder les choses arriver ou faire en sorte qu’elles se produisent. Bien, de préférence : c’est mon métier.

— Et tu danses ?

Il m’a lancé un bref coup d’œil en coin.

— Oui.

— J’aime beaucoup danser, lui ai-je confié, un grand sourire aux lèvres.

Et j’étais même plutôt bonne à ce petit jeu-là, bien que je n’aie pas souvent l’occasion de le pratiquer.

— Je chante comme une casserole, lui ai-je avoué. Mais j’adore danser.

— Voilà qui semble prometteur...

Je me suis dit qu’il faudrait d’abord voir comment se déroulait la soirée avant de prévoir de nous retrouver sur une piste de danse. Mais on savait, désormais, qu’on avait au moins un point commun. C’était déjà ça.

— J’aime bien le cinéma, ai-je enchaîné, mais je crois n’avoir jamais assisté à un événement sportif, en dehors des matchs des équipes du lycée. Mais, ceux-là, j’y vais. Football, basket, base-ball... Je n’en rate pas un.

— Tu faisais du sport à l’école ?

Je lui ai répondu que j’avais pratiqué le base-ball féminin, et il m’a dit qu’il avait fait du basket. Pas vraiment étonnant, vu sa taille.

C’était facile de discuter avec lui. Et puis, il m’écoutait, quand je parlais. En outre, il conduisait bien. En tout cas, il n’insultait pas les autres conducteurs, comme mon frère. Jason avait une légère tendance à perdre patience lorsqu’il était au volant.

Pourtant, j’attendais le revers de la médaille, la révélation fatidique... Mais si, vous savez bien ce que je veux dire : le moment où votre rencard vous avoue subitement un truc que vous ne pouvez tout bonnement pas digérer. Il se révèle être un odieux raciste ou un homophobe indécrottable ; il reconnaît qu’il ne pourrait jamais épouser une blonde (ou une fille qui ne soit pas baptiste, ou qui ne vienne pas du Sud, ou qui ne coure pas le marathon, ou ce que vous voudrez) ; il mentionne, par inadvertance, les enfants qu’il a eus avec ses trois premières femmes ; il vous avoue un goût immodéré pour les fessées ou vous raconte ses frasques de jeunesse, quand il s’amusait à gonfler les grenouilles à coups de pompe à vélo ou à torturer les chats. Après ça, même si vous passez une soirée formidable, vous savez que vous allez droit dans le mur. Quant à moi, je n’avais même pas besoin que le type me déballe ses points noirs : je pouvais les lire directement dans ses pensées.

Quinn a fait le tour de la Lincoln pour venir m’ouvrir la portière. Il s’était garé en face du théâtre, sur le parking, de l’autre côté de la rue. Il m’a pris la main pour traverser. J’ai adoré.

Il y avait foule au théâtre, et tout le monde semblait regarder Quinn. Forcément, un type au crâne rasé de près de deux mètres, ça attire l’attention. Quant à moi, j’essayais de ne pas trop penser à sa main dans la mienne, une très grande main, très chaude, très douce...

— Tous ces gens n’ont d’yeux que pour toi, m’a-t-il glissé à l’oreille, en sortant les billets de sa poche.

J’ai dû pincer les lèvres pour ne pas rigoler.

— Oh ! Je ne crois pas, non.

— Qu’est-ce qu’ils regarderaient comme ça, sinon ?

Ça m’a sciée.

— Toi.

Il a éclaté de rire, ce même rire grave qui me faisait vibrer, là, à l’intérieur, tout au fond.

On avait de bonnes places, juste au milieu. Quinn remplissait son siège, pas de doute là-dessus, et je me suis demandé si les gens pourraient voir quelque chose derrière lui. J’ai jeté un coup d’œil au programme. Je ne connaissais aucun des acteurs, mais j’ai décrété que je m’en fichais. Quand j’ai relevé les yeux, Quinn me regardait. Je me suis sentie rougir. J’avais plié mon étole pour la poser sur mes genoux et j’ai eu brusquement envie de resserrer mon cache-cœur pour cacher tout ce que mon décolleté pouvait montrer.

— J’admire, m’a-t-il chuchoté en souriant.

J’ai baissé la tête, ravie, mais un peu gênée quand même.

Beaucoup de gens ont vu Les Producteurs : je n’ai pas besoin de raconter l’histoire. Disons que ça parle de gens crédules et d’adorables voyous et que c’est très drôle. Je me suis follement amusée. C’était formidable de voir des comédiens d’un tel niveau jouer juste devant moi. Quinn a beaucoup ri aussi. Après l’entracte, il m’a de nouveau pris la main. Mes doigts se sont refermés tout naturellement sur les siens, et ce contact rapproché ne m’a pas le moins du monde embarrassée.

Je n’ai pas vu passer la deuxième partie : tout à coup, la pièce était finie. Bien que le théâtre ne soit pas près de se vider, on s’est levés en même temps que les autres spectateurs. Quinn a galamment drapé mon étole autour de mes épaules. Il regrettait que je me couvre, pourtant – j’ai lu ça directement à la source.

— Merci, ai-je murmuré en tirant sur sa manche pour qu’il me regarde (je voulais qu’il voie que j’étais sincère). C’était tout simplement fantastique.

— Ça m’a plu, à moi aussi, m’a-t-il assuré. Tu veux qu’on aille manger quelque chose ?

J’ai marqué une pause avant de répondre :

— D’accord.

— Tu as eu besoin de réfléchir pour ça ?

En fait, j’avais plutôt eu comme une succession de pensées qui m’avaient traversé l’esprit en rafale. Ça avait donné un truc comme : « Il doit passer un bon moment, sinon il ne proposerait pas de prolonger la soirée ; il faut que je me lève pour aller bosser demain, mais ce serait bête de rater une occasion pareille ; si on va dîner quelque part, j’ai intérêt à faire attention à ne pas tacher ma nouvelle tenue ; est-ce que c’est bien raisonnable de lui faire dépenser encore plus d’argent, alors que les billets lui ont déjà coûté les yeux de la tête ? »

— Oh ! Juste un petit calcul de calories, ai-je prétexté en me tapotant les fesses d’un air entendu.

— De quelque côté qu’on te regarde, je ne vois vraiment pas de problème, a tout de suite affirmé Quinn.

La chaleur de son regard m’a brusquement submergée. C’était comme plonger dans la fournaise un jour de canicule.

— Le restaurant est pour moi, alors, lui ai-je annoncé.

— Avec tout le respect que je te dois et sans vouloir te vexer, certainement pas.

Et il a planté ses yeux mauves droit dans les miens pour me faire bien comprendre qu’il était sérieux.

Il s’était arrêté sur le trottoir. Surpris par sa véhémence, je ne savais pas trop comment réagir. D’un certain côté, j’étais soulagée : j’ai intérêt à faire attention, question porte-monnaie. Mais, d’un autre côté, je savais que j’avais fait ce qu’il fallait et je me serais sentie mieux s’il avait accepté.

— J’espère que tu ne prends pas mal ma proposition. Ça n’a rien d’insultant, tu sais.

— Dans mon esprit, il est parfaitement clair que tu es mon égale.

J’ai levé vers lui un regard incertain. Manifestement, il ne plaisantait pas.

— Je suis persuadé que tu es aussi bonne que moi, dans tous les domaines, a-t-il renchéri. Mais c’est moi qui t’ai invitée : il est donc normal que ce soit moi qui paie.

— Et si c’était moi qui t’invitais ?

Il a fait la grimace.

— Dans ce cas, je serais obligé de m’effacer pour te laisser prendre les choses en main.

Il l’avait dit. À contrecœur, peut-être, mais il l’avait dit. J’ai détourné la tête pour cacher mon sourire.

Un flot ininterrompu de voitures quittait le parking. Comme Quinn et moi avions pris notre temps pour quitter le théâtre, la Lincoln semblait bien isolée, toute seule sur la deuxième rangée, quand on est arrivés. Tout à coup, mon alarme interne s’est déclenchée : je sentais, quelque part dans les parages, un déluge d’hostilité couplée à une farouche volonté de nuire. On était en train de traverser la rue. J’ai agrippé le bras de Quinn pour l’alerter, puis je l’ai lâché pour avoir les coudées franches au moment de passer à l’action.

— Il y a quelque chose qui cloche, lui ai-je murmuré.

Sans mot dire, Quinn a commencé à scruter les environs. Il a aussi déboutonné sa veste pour pouvoir bouger plus à son aise. Il avait serré les poings. Comme il était doté d’un fort instinct de protection, il s’est aussitôt placé devant moi.

Mais, forcément, on nous a attaqués par-derrière.

La reine des vampires
titlepage.xhtml
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_000.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_001.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_002.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_003.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_004.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_005.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_006.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_007.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_008.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_009.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_010.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_011.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_012.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_013.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_014.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_015.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_016.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_017.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_018.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_019.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_020.htm
Harris,Charlaine-[la communaute du sud-6]La reine des vampires.(Definitely Dead).(2006).French.ebook.AlexandriZ_split_021.htm